Pour ce nouveau numéro de Femmes et médias, je suis allée à la rencontre de la journaliste Virginie Phulpin. Depuis plus de 25 ans, de RMC à Europe 1, jusqu’à Radio Classique, le parcours de Virginie s’est construit autour d’une passion, de belles rencontres, un bon timing et l’envie constante de progresser dans son métier.

Journalisme et Sport

Très tôt, Virginie a su qu’elle voulait devenir journaliste et elle s’en souvient très précisément : « C’était exactement en 1986, année des élections législatives. J’avais 12 ans et je regardais les soirées électorales à la télé. Je trouvais cela formidable et très exaltant d’être au cœur de l’actualité et pouvoir raconter à tout le monde ce qui était en train de se passer en temps réel. Au fil des années, cet intérêt pour apporter l’information au public est resté et je me suis dit, journaliste, c’est vraiment ce que je veux faire. »

Pour y arriver, Virginie intègre le CELSA, l’École des hautes études en sciences de l’information et de la communication, puis tout s’est enchaîné assez naturellement. Au CELSA, certains de ses professeurs lui font prendre conscience qu’elle a « une bonne voix » pour faire de la radio. Comme souvent dans son parcours, Virginie est à l’écoute et se dit « pourquoi pas ? » Elle essaye alors la radio et accroche tout de suite : « J’ai toujours beaucoup écouté la radio, notamment France Inter quand j’étais petite car mes parents l’écoutaient. Quand j’ai commencé à en faire, j’ai tout de suite adoré ce média, surtout le rôle de la voix pour raconter, partager, transmettre et l’imaginaire que ça pouvait développer. J’aime aussi son côté ludique car on parle, on fait du montage, on peut partir en reportage…. Et puis, à l’époque, par rapport à la télé, la radio était vue comme un média plus sérieux, dans lequel les gens avaient plus confiance. »

Ses débuts en tant que professionnelle lui ont laissé un souvenir enthousiaste : « J’ai commencé en 1997 sur une radio locale parisienne qui s’appelait 95.2 Paris et qui était située aux Halles. C’était une expérience très formatrice car c’était une petite équipe et je pouvais tout faire : aussi bien du reportage que de la présentation, j’ai même pu réaliser mon rêve d’enfant en allant couvrir Roland Garros ! J’ai ensuite fait un bref passage par BFM, à l’époque où c’était une radio économique, pour présenter une émission autour de la mode, dans laquelle je recevais des créateurs qui me parlaient de leur travail et de leur passion. Oui, c’est un sujet assez éloigné de ce que j’ai fait par la suite mais ça correspondait à une envie du moment. Après un court passage par RFI, je suis arrivée à RMC en 2004. C’est là que j’ai commencé à traiter de l’actualité sportive. J’y suis restée 15 ans ! Le rythme de travail était très soutenu, c’était vraiment intense mais il y avait une super ambiance et quoi de plus passionnant que de couvrir de grands évènements sportifs tels que les Jeux Olympiques ou une coupe du monde de football ?! »

Virginie et le sport, c’est une longue histoire d’amour : « Même si je n’ai plus beaucoup de temps pour en faire, j’adore regarder le sport qui a toujours fait partie de ma vie. Quand j’étais enfant, je faisais beaucoup de tennis et mon père m’emmenait voir les matchs de foot. Au-delà, je trouve que le dépassement de soi, caractéristique du sport de haut niveau, est assez fantastique à observer ! Alors, quand cette opportunité de travailler dans le sport s’est présentée chez RMC, j’ai saisi ma chance ! » [Ici Virginie a une pensée amicale et émue pour , François Pesenti, son ancien professeur au CELSA et ancien Directeur Général de RMC Sport et des activités sport d’Altice Média, qui l’a recrutée à l’époque].

Virginie en retient beaucoup de positif de ses 15 années chez RMC et notamment, cette liberté de pouvoir créer et proposer de nouveaux formats : « Une année lorsque j’ai couvert Roland Garros, pour pallier l’absence de français en deuxième semaine, j’ai dit à mon rédacteur en chef que j’allais suivre Rafaël Nadal de jour comme de nuit. C’était pas gagné car je m’étais un peu avancée mais j’étais déterminée et ça a marché ! Avec l’aide de son oncle, Toni Nadal, qui était aussi son entraîneur à l’époque, j’ai pu capter des moments privilégiés qui m’ont fait vivre un Roland Garros différent des autres et j’ai pu les partager au grand public. »

Après un accident, Virginie quitte RMC et prend du temps pour elle, pour se rétablir. Lorsqu’elle se sent prête pour revenir, elle provoque une nouvelle fois sa chance en contactant son ami Matthieu Belliard qu’elle a rencontré à RMC lorsqu’il faisait la petite matinale et qui depuis, est passé chez Europe 1. Timing parfait puisqu’à ce moment-là, Europe 1 recherchait un(e) éditorialiste sport. Virginie passe un test et bingo…elle est prise !

Pendant 4 ans, elle décrypte avec intelligence, finesse et parfois une pointe d’humour les faits marquants de l’actualité sportive en prenant un angle sociétal. Cette approche semble en effet beaucoup plus adaptée à un édito en matinée qu’une analyse purement tactique du jeu qu’on trouvera plutôt dans une émission de sport le soir. Virginie est d’aillleurs convaincue que « le sport offre une grande quantité de sujets de société qui ne sont pas assez traités et exploités dans les médias. » Parmi les sujets qu’elle a traités, on retrouve des thèmes légers et d’autres plus importants pour notre société comme le racisme et l’homophobie dans le football et le sport en général, la libération de la parole suite à des violences sexuelles dans le sport (à l’époque du livre de Sarah Abitbol « Un si long silence ») et aussi, la place des journalistes femmes de sport, abordée lors de la sortie du documentaire de Marie Portolano « Je ne suis pas une salope, je suis une journaliste ». » Au-delà du sport professionnel, Virginie a donné une place de choix au sport amateur dans ses éditos : « Le sport amateur fait partie du socle de notre société. Par exemple, pendant le Covid, j’ai attiré l’attention du public sur le danger pour de nombreux clubs locaux et associations de disparaître du fait de l’arrêt des activités sportives et aussi, sur l’importance de faire rester les bénévoles. » J’ai beaucoup écouté Virginie à cette période et j’adorais ses éditos qui au-delà de l’aspect sportif, m’amenaient à me questionner, à réfléchir sur notre société. Cette aventure au micro d’Europe 1 a duré 4 ans puis Virginie a décidé de relever un nouveau challenge.

Du sport à l’actualité

Fin août 2023, Virginie a fait sa rentrée sur Radio Classique où elle présente les journaux de 6h, 7h et 8h du lundi au vendredi dans la matinale. Un nouveau virage dans sa carrière de journaliste amorcé sous l’impulsion de François Geffrier, animateur de la matinale éco de Radio Classique, qui l’avait contactée pour lui demander si présenter un journal d’actualité était quelque chose qui pourrait l’intéresser ? Une fois de plus, Virginie se dit « pourquoi pas ? » et accepte de faire un test à l’issu duquel elle est prise.

Elle voit dans cette opportunité l’occasion de se remettre en question et de grandir en se plongeant plus profondément dans les sujets d’actualité générale. Elle se réjouit aussi d’intégrer une petite structure et se rappelle avec émotion de ce lundi 28 août 2023 lorsqu’ elle présente son tout premier journal sur Radio Classique : « Même après 25 ans de métier, j’ai ressenti un mélange d’excitation et d’appréhension en arrivant dans ce nouveau studio pour y présenter un journal d’actualité, chose que je n’avais jamais faite ! J’ai pu compter sur le soutien et la présence rassurante de François Geffrier qui a fait redescendre la pression. Il m’a montré qu’il me faisait confiance et que j’étais à ma place. Puis, au bout d’une semaine, j’avais l’impression d’être là depuis longtemps, entourée d’une équipe géniale ! »

Travailler sur une matinale, c’est aussi un choix de vie : « Personne n’est plus routinier qu’un matinalier ! Je me réveille à 2h du matin, je lis les journaux chez moi tout en buvant mon café. J’arrive à 3h à la radio. Je commence toujours par allumer mon ordinateur, tout en gardant mon téléphone portable à proximité. Je note et hiérarchise les différents sujets que je vais traiter, ainsi que les brèves, puis j’écoute les différents reportages (éléments sonores) que nos équipes ont réalisés sur le terrain et qui sont susceptibles de venir nourrir le contenu des journaux. Je peux ajuster les sujets jusqu’au dernier moment car on est parfois rattrapé par une actu chaude. Aussi, on a des équipes qui peuvent faire des directs le matin si on en a besoin. Enfin, je me mets à écrire mes textes pour les trois journaux de 6h, 7h et 8h. Quand j’écris, je pense toujours à nos auditrices et nos auditeurs qui sont en train de se réveiller et commencent leur journée. Alors, quand c’est possible, j’essaye d’apporter un peu de légèreté au journal, par le ton ou par l’écriture, tout en donnant l’information, car ça, c’est essentiel ! »

Nous voilà aux fondamentaux du journalisme : une information basée sur des faits et non des opinions, ne pas tomber dans le sensationnalisme. Virginie tient à souligner cela avec conviction : « Ici, pas de place pour la polémique, ni le spectaculaire, on s’en tient aux faits qui font l’actualité ! Dans mes journaux, on ne trouvera jamais d’opinions. »

La qualité de l’information et le fait d’être au plus proche de l’actualité sont deux points essentiels qui sont au cœur des préoccupations de toute l’équipe de rédaction : « Dès qu’on sort de la matinale à 9h, on débriefe avec le rédacteur en chef et on est déjà en train de penser à la suivante. Pour préparer mes journaux du lendemain, je regarde l’agenda économique, politique, international pour trouver quelques premières idées de sujets et voir comment on pourrait les traiter. Le rédacteur en chef partage aussi ses idées et nous explique quels sont les reportages prévus pour le lendemain. Tout cela permet d’imaginer un peu mieux à quoi pourrait ressembler le contenu des journaux, tout en gardant à l’esprit que tout peut changer, selon ce qui se passe dans l’actualité et il faut parfois tout recommencer. On refait un point en fin de journée via une conférence téléphonique pour préciser les choses. On fait des choix éditoriaux qui sont toujours assumés. Par exemple, on ne traite pas des faits divers, sauf si ça devient un fait de société. D’abord parce qu’on n’a pas les moyens humains de le faire et puis, cela ne rentre pas dans la grille de la rédaction, centrée sur les infos politiques, économiques, internationales et parfois aussi un peu de sport. »

Un autre aspect du métier de journaliste auquel Virginie est attentive dans l’écriture de ses journaux et dans la manière de traiter ses sujets est l’importance de rendre l’information accessible et compréhensible au plus grand nombre, tout en restant toujours fidèle aux faits…à l’image du football expliqué à sa grand-mère qu’elle évoque avec tendresse…Avec Virginie, vous l’avez compris, le sport n’est jamais loin 😊

Le sport, toujours et encore

Virginie s’intéresse toujours d’aussi près au sport qu’elle continue beaucoup à regarder pour la beauté des performances sportives aussi bien que pour se détendre. Elle lit aussi énormément de revues sportives et d’interviews de grands sportifs, d’entraîneurs…Amusée, elle me confie qu’elle aimerait vraiment s’y remettre, par exemple en allant courir au moins une fois par semaine.

Dans son métier, ponctuellement, quand il y a un lien avec un fait de société, elle n’hésite pas à proposer un sujet sport dans ses journaux et espère qu’il sera un peu plus présent à l’avenir à l’antenne, notamment l’année prochaine avec Paris 2024 qu’elle attend bien sûr avec impatience, aussi bien que l’Euro de football.

En lien avec une association de femmes journalistes de sport, Virginie a d’ailleurs collaboré à l’écriture de « Le jour où », un livre dédié aux championnes Olympiques et Paralympiques françaises qui paraîtra un peu avant Paris 2024 (aux alentours de mars prochain), dans lequel elle a écrit un chapitre sur Colette Besson, médaillée d’or au 400 m à Mexico en octobre 1968.

En 2015, elle avait même écrit un polar (non édité) qui met en scène Zlatan Ibrahimović tué dans les vestiaires du Parc des Princes ! Et pourquoi pas un futur projet autour d’un podcast ? A suivre !

Pour terminer ce bel échange, j’ai demandé à Virginie son mot de la fin : « Laissez-vous porter par vos envies ! N’ayez pas peur d’essayer, vous apprendrez toujours quelque chose ! Multipliez les rencontres et soyez curieux du monde qui vous entoure ! »

Retrouvez Virginie Phulpin sur Radio Classique, du lundi au vendredi, pour la présentation des journaux de 6h, 7h et 8h, dans la matinale animée par David Abiker (que je salue au passage).

Merci Virginie pour le temps accordé et à bientôt !

Queen Z