(c) Martin Ripoche

Vous le savez maintenant, je suis fascinée par le processus créatif et admirative du talent et de l’audace dont font preuve certains artistes dans leurs créations.

C’est pourquoi, je suis allée à la rencontre de Martin Ripoche, un jeune designer à suivre, qui a récemment remporté le prix du public au tremplin design 2017 organisé par le WCC-BF* (World Crafts Council- Belgique Francophone).

Quel est ton parcours ?
MR : J’ai toujours été fasciné par les objets. Mes grands-parents étaient agriculteurs et avaient un vrai respect de « l’outil ». Ils m’ont donné le goût de la découverte des objets qu’ils utilisaient dans leur travail, tel que le fléau.

J’ai aussi été très tôt passionné par les objets utilisés dans l’armée. Ce qui me fascinait c’était l’ingéniosité à transformer des objets en véritable « couteau suisse » aux multiples fonctionnalités tout en les rendant très compacts. Et puis, je suis franco-belge et en Belgique, il y a une vraie culture des fêtes tout au long de l’année associée à des objets de décoration.

J’ai eu très tôt envie de dessiner, d’inventer, de créer ! J’adore les matières pures, nobles et authentiques. Je voulais aussi travailler un matériau facile à trouver et peu onéreux. Aussi, dans un premier temps, j’ai choisi la filière ébénisterie. Cela me permettait de créer en toute liberté et de maîtriser le processus de fabrication.

Puis, j’ai voyagé à travers le monde pendant un an. À mon retour, je me suis installé à Toulouse pour apprendre à travailler de nouveaux matériaux (les matériaux composites et aéronautiques) et enrichir mes connaissances et mon savoir-faire. J’ai ensuite appris à travailler les métaux et surtout l’aluminium.

Mon envie de créer en utilisant toutes les possibilités offertes par les matières m’a poussé à m’orienter vers le design, un rêve qui est devenu réalité !

Pourquoi avoir choisi de t’orienter dans le design ?
MR : J’ai choisi de devenir designer par amour pour les matières, la passion de la création, la satisfaction de donner vie à des objets, la liberté d’oser, le défi de devoir s’adapter à la matière et en même temps la dompter.

Quels sont les designers qui t’influencent le plus ?
MR : Les deux designers qui m’influencent le plus sont matali crasset et Alain Gilles. Ils rendent le design économiquement accessible, ils font ce que j’aime, ce que j’appellerais du « design domestique » c’est-à-dire en lien avec le quotidien.

matali craaset

Ce que j’aime vraiment c’est créer autour de l’art de vivre, la maison, le quotidien et vivre en harmonie avec les éléments. Je suis attentif à ce que mon mobilier s’adapte aux besoins de chacun et non le contraire. Je conçois mes créations pour qu’elles apportent plus de liberté, de confort au quotidien, et une harmonie. C’est un peu comme si « votre jeans préféré grandissait avec vous « .

Je veux que les objets que j’imagine accompagnent chacun dans sa vie de tous les jours et apportent plus de sérénité aux gens, à l’image d’un ami qui vous apaise.

Alain Gilles

Quelles sont tes sources d’inspiration et quelle méthode de création utilises-tu (photos, 3D, croquis,maquettes…) ?
MR : Je puise mes sources d’inspiration dans le désir, l’intimité, le manque, le besoin d’améliorer son quotidien. Pour créer, je touche la matière, je l’envisage presque comme une rencontre amoureuse. La matière doit me séduire.

Puis je dessine au crayon sur mon carnet qui me suit partout et bien sûr je modélise en 3D, parfois, je fais même une première maquette.

Quel objet aurais-tu aimé créer ?
MR : J’aime quand le design sublime l’essentiel et les objets utiles avec une pointe d’arrogance. Alors ma fascination ultime est la montre, peut-être la Reverso, montre emblématique de Jaeger-LeCoultre, pour son utilité, son élégance, la sensation de désir qu’elle suscite.

La Reverso de Jaeger LeCoultre

Et si tu étais un objet, lequel serait-il ?
MR : Si j’étais un objet, je serais bien sûr le tabouret que j’ai designé ! Il est composé de seulement deux matières et deux couleurs et réalisé avec des matériaux bruts mais chaleureux. C’est un objet modulable, convivial et emprunt de liberté.

(c) Martin Ripoche

Tu as récemment remporté le prix du public au tremplin design 2017 @WCCBF avec ton tabouret, participes-tu souvent à des concours ?
MR : Je viens de gagner mon premier concours en Belgique : le prix du public ! Cela me touche énormément car comme je le disais précédemment, je veux être un désigner du quotidien, apporter aux gens quelque chose d’utile dans leur vie grâce aux objets.

Je participe régulièrement à des Braderies d’Art. Lorsque les organisateurs proposent des challenges créatifs avec des objets du quotidien à recycler, là je suis dans mon élément et j’adore ce challenge créatif ! Ma prochaine Foire de l’Art sera en novembre à Roubaix.

(c) Martin Ripoche

Peux tu nous en dire un peu plus sur le processus créatif de ton tabouret (quelles ont été les différentes étapes de la conception à la réalisation)?
MR : Je suis parti du constat que souvent quand on invite des amis chez soi, tout le monde a envie de s’installer autour de la table basse pour l’apéro et on manque toujours de siège. Je voulais que cet objet vive par lui-même, s’adapte à une situation du quotidien et y apporte une réponse concrète. Un jour tabouret, un jour banc, un autre foot stool. Chacun est ainsi libre de choisir une configuration adaptée à son besoin ou son envie !

Pour plus de convivialité, j’ai utilisé des matériaux chauds et légers. Ma culture classique du bois et le côté « clipsable » de l’objet m’ont conduit à élaborer une assise autour d’une double queue d’aronde. J’ai choisi une mousse répondant bien à la sensation de confort et le bois pour son côté authentique, naturel et chaleureux. C’est un mélange de matières brutes avec des couleurs d’esprit nordique.

L’essentiel pour moi c’est que la matière soit au service de l’objet et que l’objet soit au service de notre quotidien. Je pense mes objets comme un outil de liberté ! 

© Claire Delobelle

Qu’est-ce que ce prix t’a apporté ?
MR : Ce prix m’a permis entre autre d’obtenir une plus grande visibilité. C’est vraie une satisfaction personnelle, une récompense qui donne confiance en soi. C’est ma première victoire durement gagnée.

Ce prix m’a aussi permis de prouver mes capacités et me montrer que j’en étais capable. J’ai eu le prix qui à mes yeux est le plus important car il représente le choix d’une grande communauté de personnes qui ont voté pour un projet qu’ils ont vu et aimé.

Au-delà, selon toi qu’est-ce qu’apporte le design dans la société ?
MR : Aujourd’hui, le design est présent partout. Il apporte une réflexion sur la place de l’objet dans la vie quotidienne tout en amenant de « la beauté » avec la recherche d’une certaine esthétique et harmonie associée à une réflexion autour de l’utilisation de matériaux plus écologiques et durables.

Lis tu des blogs de design ?
MR : Pour l’instant, je privilégie le fait de sortir pour m’inspirer du monde qui m’entoure, visiter des expositions et découvrir des oeuvres dans des galeries. Je suis toujours à la recherche de nouvelles rencontres et d’expériences ! Mais, je commence tout doucement à m’y mettre et à me plonger dans cet univers très riche !

Quels sont tes projets pour 2018 ?
MR : J’aimerais créer ma propre gamme d’objets, travailler avec plusieurs personnes au savoir-faire différent pour acquérir de nouvelles connaissances et aussi, transmettre mon savoir. Je suis actuellement en train de développer de nouveaux objets 😉 À suivre sur mon Instagram : Martin Ripoche.

En un mot, en 2018, le design sera…
MR : Écologique !

Merci Martin pour ta disponibilité et notre échange passionnant ! On te souhaite beaucoup de succès dans tes projets !

* WCC-BF : association professionnelle regroupant plus de 200 créateurs et valorisant les métiers dans le domaine des arts appliqués et du design artisanal. Il porte une attention particulière aux jeunes créateurs en fin d’études ou démarrant leur carrière professionnelle.

Princess Zaza